
On a tous un rôle à jouer pour combattre la corruption
La corruption est un problème fondamental pour le développement, elle persiste dans tous les pays et se manifestant sous de facettes multiples. Elle exacerbe les inégalités et réduit les investissements privés au détriment des marchés, des opportunités d’emploi et des économies. La corruption peut saper la confiance que les citoyens accordent à leurs dirigeants et à leurs institutions, créant des tensions sociales et augmentant dans certains contextes, le risque de fragilité, de conflit et de violence si elle n’est pas combattue elle nuit les personnes vulnérables et les pauvres, augmentant les coûts et réduisant l’accès aux services de base, et même de la justice.
Mohamed Gakou, Adjoint au Responsable de la Composante organisation de la société civile, Projet d’Appui à la lutte contre Corruption pour et par l’égalité des genres (LUCEG) souligne quela lutte contre la corruption au Mali n’a pas toujours été encouragée par les autorités. Parler de la corruption était presqu’un tabou au Mali en raison de l’implication des plusieurs cadres dans les actes de corruption. Cependant, cette situation a considérablement évolué avec la création de plusieurs organisations de la société civile évoluant spécifiquement dans le domaine de la lutte contre la corruption (Plateforme de lutte contre la corruption, association de lutte contre la corruption et la délinquance financière, coalition des organisations de la société civile pour la lutte contre la corruption et la pauvreté etc.). De plus on constate une étroite collaboration entre les structures étatiques de lutte contre la corruption et ces organisations qui sont directement impliquées dans les actions de prévention et de sensibilisation de lutte contre le phénomène. L’exemple le plus récent est la participation de plusieurs structures non étatiques dans l’élaboration et l’adoption de la stratégie nationale de lutte contre la corruption pilotée par le ministère de la Refondation, chargé des relations avec les institutions.
En ce qui concerne la participation des acteurs et actrices de médias, elle est également effective dans la mesure où il existe un réseau malien des Journalistes pour la lutte contre la Corruption et la Pauvreté et plusieurs journaux d’investigation en la matière. La participation des acteurs de la société civile a connu des obstacles liés d’une part à la réticence des autorités à délivrer des récépissés aux organisations de la société civile et d’autre part à l’inexistence de loi protégeant les lanceurs d’alerte. Cependant, on constate depuis 2020 que les autorités sont de plus en plus favorables à la création d’organisations de lutte contre la corruption. Plusieurs structures ont reçu depuis cette date des permis et exercent aujourd’hui librement leurs activités de dénonciation, de prévention et de sensibilisation en matière de lutte contre la corruption.
Selon Mariam Diama, la Présidente de la Communauté des Pratiques en matière de Lutte contre la Corruption (CPLC), l’impact de la corruption sur le développement,affaibli le développement des infrastructures économiques et sociales qui devraient constituer le socle de l’économie et de la stabilité, détérioration rapides des infrastructures sociaux de base, accès inéquitables aux services publics de bases ; détériore la qualité des infrastructures et des services délivrés suite à l’exécution des marchés publics du fait que les pourcentages indument perçus par les attributaires sur les montants des marchés ne sont pas investis par les exécutants des marchés ; la perte de confiance entre usagers et agents publics, la création d’une économie parallèle et souterraine qui échappe à tout contrôle de l’État, tel que le trafic de drogue et d’armes avec leurs conséquences sur la stabilité sécuritaire etc…
Quant au Président, du Réseaux de l’Association Malienne de Lutte contre la Corruption et la Délinquance Financière (RAMLCF), Moussa Ousmane Touré affirme que la lutte contre la corruption doit devenir l’affaire de tous tout comme le développement au Mali ; un combat de longue haleine. La lutte contre la corruption doit se faire dans le respect des textes en vigueur. Une volonté politique ferme de lutter contre la corruption, sans exclusive, est indispensable, appuyée par des objectifs clairs, objectifs qui doivent s’inscrire dans une stratégie nationale cohérente, le tout devant baigner dans un contexte démocratique et de libertés.
Ibrahima Coulibaly, membre de la Coalition des Organisations de la Société Civile pour la Lutte contre Corruption et la Pauvreté (COSCLCCP) rencontre que la corruption au Mali est un phénomène dangereux qui a beaucoup impacté négativement la société malienne. Ses effets touchent toutes les couches sociales, ce qui freine considérablement le développement du pays à tous les niveaux. Malgré quelques « mesures » pour lutter contre ce fléau, la corruption persiste au sein de la société. La lutte contre la corruption demeure cruciale pour le développement économique et la stabilité du Mali. Donc il est essentiel de continuer à sensibiliser, sanctionner et promouvoir la transparence pour un avenir meilleur.
Dr. Moumouni Guindo, Président de l’Office Centrale de Lutte contre l’Enrichissement Illicite (OCLEI) lors de la semaine de jeunesse contre la corruption déclare que la corruption est une gangrène, et nous devons la combattre comme on combat une maladie, car elle représente une véritable pandémie. C’est pourquoi la lutte contre la corruption au Mali est une démarche vitale à laquelle nous sommes tous engagés. La Banque africaine de Développement (BAD) estime que la corruption entraîne une perte annuelle de 148 milliards de dollars, soit environ 25% du PIB de l’Afrique. De plus, l’ONUDC indique qu’à l’échelle mondiale, chaque année, environ 1 000 milliards de dollars sont versés en pots-de-vin, tandis que plus de 2 600 milliards de dollars, représentant plus de 5% du PIB mondial, sont détournés.
Amidou Doumbia, ancien Agent du bureau d’assistance et de plaidoyer de l’Association des Jeunes pour la Citoyenneté Active et la Démocratie (AJCAD) dans son propos,le chômage, la délinquance juvénile, la rébellion etc, la corruption est la source de tous les maux dans une société organisée. Tout comme elle maintient le pauvre dans sa pauvreté, elle stagne l’état au rang des état sous-développés et même profondément endetté. Pour un etat fort, émergent et égalitaire, nous devons prôner la citoyenneté qui permettra à chacun d’entre nous de se contenter de ce qu’il gagne sans comparaison.
Dr. Bourama Diawara, Epidémiologiste de Malaria Reserch Training Center (MRTC) à l’hôpital du point G affirme que la corruption dans le secteur de la santé au Mali est un problème complexe et multifactoriel, enraciné dans diverses causes socio-économiques et institutionnelles. L’une des principales causes est la faible rémunération des agents de santé, qui pousse certains à rechercher des revenus complémentaires par des moyens illicites, tels que la vente illégale de médicaments ou la facturation de services normalement gratuits. Par exemple, il n’est pas rare que des patients soient obligés de payer des pots-de-vin pour obtenir des soins ou des médicaments qui devraient être fournis sans frais. Le manque de transparence et de contrôle dans la gestion des fonds alloués à la santé constitue une autre cause majeure. L’absence de systèmes rigoureux de surveillance et de responsabilité permet la fraude et le détournement de fonds. Par exemple, des fonds destinés à la construction ou à l’entretien des hôpitaux peuvent être détournés, ce qui conduit à des infrastructures dégradées et insuffisantes. L’impunité et la faiblesse des institutions judiciaires exacerbent également le problème. Lorsque les actes de corruption ne sont pas punis, ils deviennent plus fréquents. Les individus impliqués dans des activités illicites continuent souvent à opérer sans crainte de répercussions. Les conséquences de cette corruption sont dévastatrices. Elle entraîne une pénurie de médicaments, une dégradation des infrastructures de santé, et une inégalité croissante dans l’accès aux soins. La qualité des soins en souffre, augmentant ainsi la mortalité infantile, la prévalence des maladies évitables, et la méfiance des populations envers le système de santé. Ce cercle vicieux perpétue la pauvreté et affaiblit encore plus le système de santé malien.
Lutter contre la corruption est un combat commun, elle sape également la confiance des citoyens envers les décideurs, ce qui peut engendrer des tensions sociales. En somme, la lutte contre la corruption demeure cruciale pour le développement économique et la stabilité du Mali. Il est essentiel de continuer à sensibiliser, sanctionner et promouvoir la transparence pour un avenir meilleur.
Samba Lamine Cissé