Le Mardi 11 octobre, la Commission de rédaction de la nouvelle Constitution (CNRC) a remis le document de l’avant-projet de la Constitution au Président de la Transition, Chef de l’Etat, le Colonel Assimi Goita. C’était au Palais de Koulouba, en présence du Premier ministre par intérim, le Colonel Abdoulaye Maïga, des Présidents des institutions de la République, des membres du gouvernement et de l’ensemble des membres de la CNRC.
L’élaboration d’une nouvelle Constitution de la République du Mali est une des recommandations phares des Assises Nationales de la Refondation(ANR) organisées par les autorités de la Transition en fin décembre 2021.
Notre pays, le Mali, a traversé des moments difficiles occasionnés par un système de gouvernance assez médiocre. Depuis l’indépendance jusqu’à nos jours, le Mali a enregistré plusieurs coups d’Etat qui ont retardé son émergence. D’où la nécessité de revoir ses textes fondamentaux, le fondement même de la République c’est-à-dire la Constitution. Dans cette optique, lors des Assises Nationales de la Refondation, les recommandations ont demandé l’élaboration d’une nouvelle Constitution. Cela se comprend aisément, puisque celle de 1991 ne répondait plus aux réalités socio-politiques de notre pays. Elle apparaissait aux yeux de beaucoup comme « un produit importé ». Et la création de la Commission de rédaction de la nouvelle Constitution en juin 2021 avec des éminents juristes, dépositaires de nos savoirs et culture, s’inscrivait dans ce cadre-là. A savoir, élaborer une nouvelle Constitution en insérant des recommandations des ANR. Après trois mois de dur labeur la CNRC a produit un avant-projet de la nouvelle Constitution, dont le document fut remis au Chef de l’Etat, la semaine dernière.
Pour le Président du CRNC, le Pr Fousseyni Samaké, deux étapes ont été suivies par sa commission. Premièrement, la commission a consulté les forces vives de la nation avec à la clé des visites de courtoisie, des correspondances adressées aux partis politiques, des séances d’écoute et d’échanges, la création d’un site web pour le grand public, entre autres. A ses dires, l’élaboration d’une nouvelle Constitution répond aux aspirations profondes du peuple malien, exprimées lors des ANR. « Cette nouvelle Constitution est un marqueur important du processus de refondation de l’Etat malien », a-t-il indiqué. Et de continuer que la seconde étape a visé l’élaboration de l’avant-projet de Constitution et du rapport de fin de mission.
Pour le Président de la Transition, le Colonel Assimi Goita, l’objectif du processus en cours est de doter notre pays d’une nouvelle Constitution en vue d’avoir des institutions fortes et stables répondant aux besoins de gouvernance de l’Etat. Il a fait savoir qu’après de nombreuses années de soubresauts politiques, il est nécessaire que nous repartions sur de nouvelles bases afin de créer des conditions d’instauration d’une Démocratie réellement représentative dans un cadre social apaisé et convivial. « J’ai suivi avec beaucoup d’intérêt les différentes activités et particulièrement la méthode de travail adoptée», a dit le Chef de l’Etat. Et de souligner que notre espoir commun d’une démocratie rénovée, ainsi que d’un Etat mieux organisée et à la hauteur des défis nationaux et internationaux reposent sur cet avant-projet de Constitution. Il a ensuite félicité et remercié les membres de la Commission pour le travail remarquable accompli en un temps record. « Je remercie l’ensemble des Maliennes et des Maliens qui ont compris les enjeux auxquels nous faisons face aujourd’hui et ont participé massivement et activement au processus en apportant leurs contributions », a-t-il ajouté.
A coup sûr, l’adoption de cette nouvelle Constitution marquera le début de la 4ème République.
Adama Tounkara
L’avant-projet de la nouvelle constitution : Malgré des innovations importantes, des toilettages nécessaires !
Le Mardi 11 octobre 2022, l’avant-projet de la nouvelle Constitution a été remis au Président de la Transition par le Pr Fousseyni Samaké, Président de la Commission de la rédaction de la nouvelle Constitution. Selon plusieurs partis politiques et organisations de la société civile de la place, cet avant-projet mérite des corrections.
Cet avant –projet de la nouvelle Constitution comporte 195 articles et contient des innovations comme la fixation du nombre des membres du Gouvernement à 29, les suppressions de la Haute Cour de Justice et du Haut Conseil des Collectivités Territoriales ; la création d’une Cour des Comptes ; l’impossibilité pour l’Assemblée de renverser le Gouvernement ; la création d’un nouveau parlement ; l’interdiction à un élu de quitter son parti en cours de mandat, etc.
Lors de son passage sur le plateau de 20H de l’ORTM, le président de CRNC, le Pr Fousseyni Samaké a déclaré que les innovations et les changements que cet avant-projet comporte sont extrêmement importants. Pour rappel, il dira que la première Constitution du Mali, celle de 1960 comportait 52 articles, celle de 1974 comportait 81 articles et celle de 1992 comporte 122 articles. Pour lui, l’accroissement du nombre d’articles dans la nouvelle Constitution, s’explique par la complexité du monde, la multiplication des acteurs et des grandes problématiques.
En outre, certaines innovations dans cette nouvelle loi fondamentale ont suscité des réactions, notamment sur le renforcement du pouvoir du président. Pour rappel, dans la Constitution de 1992, il est dit que « le gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation » tandis que dans l’avant –projet de la nouvelle Constitution c’est le président de la République qui déterminera désormais la politique de la Nation et le gouvernement pour conduire la politique de la nation déterminée par le président de la République. Dans un ton ironique, le chroniqueur Ras Bath du Collectif pour le Développement de la République(CDR), a indiqué que ce point comme tant d’autres feront du Président qui va être élu en 2024 un « Kaya Maghan », c’est-à-dire un Roi plein pouvoir.
Cependant, ce qui a attiré les attentions dans cette nouvelle Constitution relève du fait qu’il y a l’impossibilité pour le président de la République de toucher à la limitation du nombre de mandat présidentiel, fixé à deux au maximum. Aussi il est dit expressément comme dans l’ancienne que « tout coup d’Etat ou putsch est un crime imprescriptible ».
En effet, cet avant-projet de Constitution devra être examiné en Conseil de ministres et après par les membres du Conseil National de la Transition. Et après il sera soumis au referendum en mars 2023. Faut-il s’attendre à d’autres toilettages ?
Adama Tounkara
Le Sursaut