
Vers un nouveau Programme décennal de développement du secteur de la justice 2026-2035
Ouverts jeudi 30 octobre 2025 au CICB sous la présidence du général d’armée Assimi Goïta, les travaux du Forum national sur la justice connaitront leur épilogue ce vendredi. Et 413 recommandations issues des concertations régionales sont soumisses à l’examen des 200 participants. Au cours des travaux, il sera question des conditions de distribution de la justice, de la restauration de la confiance des citoyens en la justice ainsi que les défis de la justice pour la stabilité et la paix sociale. Sans oublier les perspectives de développement du secteur de la justice, la gestion pénitentiaire, les droits de l’homme et surtout justice et culture. Au finish, il s’agira de l’adoption d’un nouveau Programme décennal de développement du secteur de la justice 2026-2035.
C’est parti depuis hier au CICB pour les travaux du Forum national sur la justice dont la cérémonie d’ouverture était placée sous la présidence du chef de l’Etat, général d’armée Assimi Goïta en présence des membres du gouvernement ainsi que les acteurs du secteur de la justice. Avant cette cérémonie, ce fut les différents ateliers sur la problématique de la justice.
Pour le président de la commission d’organisation, secrétaire général du ministère de la Justice et des droits de l’Homme, Dr. Boubacar Sidiki Diarrah, ce forum, après celui de 1999, vise à : définir et partager une vision commune du service public de la justice ; établir une synergie d’action entre les différents acteurs de la justice ; amener les acteurs de la justice à offrir un service de justice crédible, efficace et transparent au service du développement, de la paix et de la cohésion sociale.
Ce n’est pas tout. Il s’agira aussi d’encourager la prise en compte par les acteurs de la justice des enjeux liés à la Confédération des Etats du Sahel ; d’instituer une justice efficace et transparente au service du développement, de la paix et de la cohésion sociale ; de juger de la pertinence des recommandations formulées lors des concertations régionales et des Etats généraux sectoriels des professions juridiques et judiciaires ; de disposer d’un nouveau Programme décennal de développement du secteur de la justice 2026-2035.
Faisant la genèse du Forum national sur la justice, il dira que le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, garde des Sceaux avait annoncé la tenue d’un Forum national sur la justice lors de la clôture de la 2e édition de la Semaine de la justice, le 28 janvier 2023. A la suite de cette annonce, dira-t-il, le ministre a invité tous les ordres professionnels à organiser leurs Etats généraux sectoriels. A la suite desquels, il a été décidé d’organiser les concertations régionales dans les ressorts des Cours d’appel de Bamako, Kayes et Mopti obéit au besoin du découpage judiciaire différent de celui administratif. Ces rencontres préparatoires au Forum national, ajoutera-t-il, ont enregistré la participation qualitative de 500 personnes (autorités administratives, représentants des Forces vives de la nation, des acteurs judicaires…) dont 200 à Bamako, 150 à Kayes et 150 à Mopti. Au cours des travaux, il sera question des conditions de distribution de la justice ; la restauration de la confiance des citoyens en la justice ; perspectives de développement du secteur de la justice ; les défis de la justice pour la stabilité et la paix sociale ainsi que la gestion pénitentiaire, les droits de l’Homme et enfin justice et culture. Au titre des concertations régionales, 322 recommandations ont été formulées et réparties comme suit : 156 recommandations à Bamako ; 73 à Kayes et 95 à Mopti.
Lors des Etats généraux des ordres professionnels, il a été formulé au total 91 recommandations réparties comme suit : 19 recommandations pour les avocats, 38 pour les notaires, 9 pour les huissiers commissaires de justice, 25 pour les experts judiciaires. Et selon Dr. Diarrah, le cumul du nombre total des recommandations des concertations régionales et des Etats généraux se chiffre à 413 recommandations qui sont soumises à l’examen des participants au Forum national sur la justice.
Définir et partager une vision commune du service public de la justice
A l’en croire, le Forum regroupera 200 participants représentants les autorités administratives, les Forces vives de la nation et les acteurs judicaires désignés parmi les participants des concertations régionales. Aussi, les gouverneurs des régions, présidents des concertations régionales des trois ressorts des Cours d’appel, ont choisi les délégués en tenant compte de la représentation de toutes les régions.
S’agissant du budget, il a rappelé que le budget à la fois des concertations régionales ayant concerné les 19 régions et le district de Bamako et le Forum national est estimé à 200 millions de F CFA exclusivement financé sur budget national. Ce qui est d’ailleurs une première, selon le président de la Commission nationale d’organisation.
En conclusion, Dr. Diarrah a estimé que la très forte mobilisation, l’engouement et le succès des concertations régionales sur la justice leur donnent de l’espoir et présument du succès attendu dudit forum. Avant d’inviter les participants à tenir des débats courtois, objectifs, francs, constructifs, sans tabou ni faux fuyant, mais surtout empreints de respect mutuel pour bâtir une justice efficace, transparente et accessible au service du citoyen et de la nation.
Pour mener à bien ce grand rendez-vous, une commission d’organisation a été mise en place et comprend trois sous-commissions : sous-commission scientifique ; sous-commission organisation matérielle ; sous-commission finances. Et de préciser que la fonction de membres de la commission d’organisation ne donne droit à aucune indemnité ni a aucun avantage particulier. Car, les fonctions sont gratuites et les frais de fonctionnement sont à la charge du budget national.
S’agissant de l’état de la justice au Mali, Dr. Diarrah a estimé que beaucoup a été fait en 4 ans sous le leadership du ministre Mamoudou Kassogué afin de redonner l’image de la justice.
En évoquant les reformes, il a laissé entendre que plus d’une dizaine de textes ont été adoptés (la loi portant statut de la magistrature, la loi portant statut modifié des greffiers, la loi organique fixant les règles d’organisation et de fonctionnement ainsi que la procédure suivie devant la Cour suprême, la loi organique fixant les règles d’organisation et de fonctionnement ainsi que la procédure suivie devant la Cour constitutionnelle, la loi portant saisine de la Cour constitutionnelle pour exception d’inconstitutionnalité, la loi portant loi organique fixant les règles d’organisation et de fonctionnement ainsi que la procédure suivie devant la Cour des comptes, la loi portant organisation judiciaire modifiée, le projet de loi portant statut de l’apatridie sur la table du Conseil national de transition, le nouveau Code pénal, le nouveau Code de procédure pénale) et sept structures ont été créées (le Pôle national économique et financier, le Pôle judiciaire de lutte contre la cybercriminalité, la direction nationale des droits de l’Homme, l’Agence de recouvrement et de gestion des avoirs saisis ou confisqués, l’Ecole nationale de l’administration pénitentiaire et de l’éducation surveillée, le parquet spécialisé du Pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée séparée du Tribunal de grande instance de la Commune VI, la Cour administrative d’appel de Bamako).
Concernant la mise en œuvre du nouveau code, toutes les infractions prévues sont en train d’être appliquées dans les juridictions. Quant au nouveau Code de procédure pénale, il est entré en vigueur depuis le 13 juin dernier.
En termes de ressources humaines, Dr. Diarrah a indiqué qu’elles constituent un élément central de réussite des reformes et du bon fonctionnement de la justice. Au Mali, dans le secteur judiciaire, le personnel était en deçà des besoins de la justice.
« Nous comptions 499 magistrats pour une population près de 23 millions avec un ratio d’un magistrat pour plus de 40 000 habitants. Alors que dans les normes internationales, c’est magistrat pour 10 000 habitants. Pareil pour les greffiers, les avocats… A tous les niveaux, il y a des déficits. Nous avons pris des dispositions pour les combler en faisant des recrutements massifs », avait précisé le ministre Kassogué lors d’une émission à l’ORTM. C’est pourquoi, dira-t-il, le département a procédé au recrutement de 316 auditeurs de justice, 240 greffiers en chef, 125 fonctionnaires de l’administration pénitentiaire et de l’éducation surveillée en quelques années.
Dans le domaine du contrôle interne, la systématisation des missions d’inspection des services judiciaires a permis de contrôler 16 juridictions, 16 maisons d’arrêt, 4 pénitenciers agricoles.
Dans le domaine de l’administration pénitentiaire, 22 transfèrements ont concerné un nombre total de 1750 détenus, sur Kéniéroba, Koulikoro, Bla, Fana et Dioïla. Ainsi, de 4500 détenus en 2023, la Maison centrale d’arrêt de Bamako a été ramenée à 3750 diminuant drastiquement la surpopulation carcérale.En matière de formation des acteurs, 363 magistrats, 100 greffiers, 124 officiers de police judiciaire, 22 interprètes ont été formés. Aussi, dans le cadre des dotations en moyens de travail, l’on recense 20 987 matériels et mobiliers de bureaux dont 2344 pour les services centraux et les juridictions de Bamako et 643 pour les services de l’intérieur du pays.
Il convient de noter que dans le domaine de la lutte contre la corruption et la délinquance économique et financière, plus de 400 milliards F CFA ont été recouvrés, régularisés, payés en caution ou en dommages-intérêts, comme indiqué par le garde des Sceaux à la clôture de la 3e édition de la Semaine de la justice.
Dans le cadre de la mise à disposition de fonds documentaire, il ressort que 499 recueils de circulaires, 998 codes pénaux et codes de procédure pénale ont été mis à la disposition des magistrats mettant fin à la quête difficile des documents de travail des professionnels.
El Hadj A.B.HAIDARA