Fruit d’intenses et délicats pourparlers entre le Gouvernement d’alors et la Coordination des Mouvements de l’Azawad, CMA, l’Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus d’Alger, a été signé en 2015 à Bamako. Huit ans après cette signature, sa mise en œuvre rencontre d’énormes difficultés. Les deux protagonistes, à savoir l’Etat malien et les groupes signataires se jettent la responsabilité du blocage, alors que la communauté internationale, garante de cet accord, exige sa mise en œuvre diligente. Va-t-on assister à un bras de fer entre l’Etat et les groupes armés signataires ? Les deux parties finiront-elles par s’affronter militairement ? Et si le dialogue est la seule alternative crédible pour les deux belligérants afin d’éviter la tropicalisation de la guerre Russo-Ukrainienne au sahel.
Pour rappel depuis l’avènement de la junte militaire au pouvoir au Mali et en dépit de l’engagement que les autorités de la transition avaient pris, à savoir le respect de tous les accords signés par l’Etat, celui pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, connait d’énormes difficultés. En effet, chaque camp revendique sa bonne volonté dans l’application, et rejette la responsabilité du blocage sur l’autre. La réalité est tout autre chose, car si la CMA reste campée sur sa position, à savoir l’application intégrale de l’Accord, les autorités maliennes de leur part sont favorables à une relecture qui aboutirait à une application de façon intelligente de cet accord. Désormais l’on peut affirmer sans ambages qu’il y a blocage. Cette délétère situation qui est consécutive à une différence d’approche entre les deux parties, empoisonne à coup sûr les relations entre la CMA et le gouvernement malien et chaque camp rejette la responsabilité de ce blocage sur l’autre. Aujourd’hui tout porte à croire que les deux parties sont en train de fourbir leurs armes et la guerre est en passe d’être l’ultime solution.
Va-t-on assister à un bras de fer entre l’Etat et les groupes armés signataires ?
Le bras de fer est déjà engagé, comme en atteste la proposition de la CMA pour la tenue d’une réunion sur la mise en œuvre de l’Accord sur un terrain neutre. C’est par un niet sans équivoque que le Gouvernement malien a répondu à cette proposition de la CMA. Le deuxième fait illustrant ce bras de fer entre l’Etat et la CMA est sans nul doute le refus de la CMA de siéger au sein de la Commission de finalisation de l’avant-projet de la nouvelle constitution. Pour rappel en dépit de la guerre larvée, la CMA a ses représentants au sein du CNT et du Gouvernement, mais pour combien de temps encore au regard de la tournure que prennent les événements. En effet, une délégation de la médiation internationale s’est rendue à Kidal fief de la CMA afin de permettre la relance du dialogue pour la mise en œuvre de l’Accord. Cette mission semble échouée à faire fléchir la CMA qui continue d’ailleurs sa provocation en renonçant à demi-mot à son appartenance à l’Etat malien et en se considérant comme Azawadien. Le prétexte tout trouvé est la non application de l’Accord, le seul document, selon eux, qui les lie au Mali. La rupture semble consommée et la guerre inévitable.
Les deux parties finiront-elles par s’affronter militairement ?
Toutes les deux parties adoptent une posture guerrière et se préparent à l’affrontement armé. Le Mali ne cesse de se doter d’armes tant aériennes que terrestres. Si officiellement c’est pour combattre les terroristes, officieusement l’Etat prépare une offensive de grande envergure pour recouvrer la totalité de son territoire. Quant au camp d’en face il ne dort plus sur ses lauriers. La CMA, puis que c’est d’elle qu’il s’agit, ne se prive plus du soutien des mouvements terroristes comme le JNIM de Iyad Ag Ghali et d’Amadou Koufa. Selon nos informations ces deux personnalités, pourtant recherchées, étaient en conclaves avec les ex rebelles et se seraient pavanées ces derniers temps à Kidal au su et au vu de tout le monde. Le dernier acte que la CMA vient de poser est la nomination d’un colonel comme chef d’Etat-major et de son adjoint. Désormais, chaque camp fourbit ses armes et compte sur le soutien de ses alliés. Si l’Etat malien pourra compter sur la Russie et certains de ses alliés, la CMA espèrerait sur la France et ses alliés occidentaux. Ne sommes-nous pas en train de transporter la guerre Russo-Ukrainienne au sahel ? Le dialogue n’est-il pas préférable à la guerre aux conséquences désastreuses ?
Et si le dialogue est la seule alternative crédible pour les deux belligérants afin d’éviter la tropicalisation de la guerre Russo-Ukrainienne au sahel.
Tout porte à croire qu’en cas de conflit armé entre l’Etat malien et la CMA, le premier aura le soutien de la Russie et la CMA aura celui de la France et ses alliés occidentaux. Ni le gouvernement malien encore moins la CMA ne gagnerait dans un tel scénario. La crainte d’une somalisation ou d’une Afghanisation de la crise malienne refait surface et les conséquences ne pourront qu’être dramatiques. Donc il serait mieux d’instaurer le fil du dialogue afin d’aboutir à un compromis qui ne blaserait aucune de deux parties. Cette solution alternative aura comme avantage d’éviter au Mali et aux maliens une guerre sans fin, comme en Afghanistan, en Somalie et au Soudan.
Youssouf Sissoko
PRISE DE CONTACT ENTRE L’AIGE ET LES ACTEURS SOCIOPOLITIQUES : Les membres de l’organe se montrent rassurants
Trois mois après leur installation , les membres de l’autorité indépendante de gestion des élections ( AIGE) ont enfin, brisé le silence en organisant les 1er et 2 février 2023 au CICB, une série de rencontres avec les acteurs sociopolitiques sur les actions menées par la commission. En effet, la lenteur dans le processus électoral, le doute sur le respect du calendrier électoral, l’inclusivité sont entre autres, des griefs évoqués lors de ces rencontres de prise de contact.
Ces derniers moments, l’absence de dialogue semble avoir porté préjudice aux relations qui lient non seulement, les autorités aux forces sociopolitiques, mais aussi et surtout, aux membres de l’autorité indépendante de gestion des élections (AIGE) lesquels, sont contraints de réussir leurs missions afin de doter le pays, des mécanismes d’institutions politiques efficaces tout en l’épargnant de toute éventuelle contestation post- électorale, source de rupture constitutionnelle et institutionnelle. C’est dans ces contextes que lesdits membres de la commission conduits par Moustaph Cissé ont rencontré séparément quelques forces politiques y compris celles de la société civile pour lever des équivoques sur le processus électoral en vue. Par ailleurs, celles-ci ont manifesté leurs inquiétudes par rapport au respect du calendrier électoral, et d’autres questions diverses touchant aux fonctionnements de l’AIGE avant de mettre l’accent sur la prise en compte des observateurs locaux pendant les élections, l’inclusivité et l’indépendance des commissaires desdits membres vis-à-vis des pouvoirs publics. » Nous mesurons l’importance de la mission qui nous a été confiée, nous allons l’assumer et donnerons le meilleur de nous-mêmes », a rassuré le président de la commission Moustaph Cissé. Et d’ajouter qu’ils vont appliquer sans complaisance, la loi, de respecter les textes en vigueur en fin de poser des actes importants et historiques dans l’organisation des élections dans notre pays. Toutefois, M Cissé se réserve sur la question du respect du chronogramme électoral décliné par les autorités et insiste plutôt sur la crédibilité et la responsabilité de tous les acteurs concernés face aux défis actuels de l’heure. De même, il se félicite d’avoir procédé à la relecture de la loi électorale, à l’élaboration du règlement intérieur, l’aménagement des salles de réunion en informatique, la mise en place « consensuelle » des membres du bureau de l’AIGE, l’instauration de la confiance entre ses membres. Avant de laisser entendre que l’Autorité indépendante de gestion des élections ( l’AIGE) demeurera dans une dynamique de concertation et d’échanges avec toutes les sensibilités sociopolitiques. Aussi le président de la commission envisage déjà, de mener d’autres actions à l’égard de certains leaders politiques qui sont jusque-là réticents vis-à-vis du processus dont le parti CODEM de Housseyni Amion Guindo, YELEMA de Moussa Mara afin qu’ils adhèrent au processus politique en cours. En outre, il va préciser que » le comité de pilotage relevant du ministère de l’administration, est une mission d’appui à l’organe de gestion et réfute par conséquent, que ce mécanisme étatique n’est ni celui d’accaparement, ni d’occupation encore moins, de substitution des prérogatives de l’AIGE. Rappelons que l’Autorité indépendante de gestion des élections a pour mission l’organisation et la gestion de toutes les opérations référendaires et électorales. Et ses membres ont un mandat de 7 ans non renouvelable.
Yacouba COULIBALY